Agilité en temps de crise : Une start-up bangladaise à l’origine d’une révolution numérique dans le secteur agricole
Le virus de la COVID-19 a contaminé près de quatre millions de personnes dans le monde et a eu des conséquences dévastatrices, en particulier dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où la pandémie a eu des répercussions sociales et économiques importantes et a très durement touché les personnes les plus vulnérables. En raison des confinements mis en place par les gouvernements, les entreprises ont dû faire face à de nouveaux défis opérationnels et financiers.
Au Bangladesh, les rues de Dhaka, autrefois animées, sont désormais d’un calme sinistre : les citoyens sont confinés chez eux. Le gouvernement, l’ONU, les organisations de la société civile et les organisations non gouvernementales ont déployé des efforts considérables pour tenter de limiter la propagation du virus et de faire face à ses conséquences économiques. Le secteur privé est un autre acteur important de la riposte, notamment grâce à une forte culture des start-ups dans le pays.
Pour réussir, une start-up doit être agile et capable d'identifier des opportunités là où d'autres voient des obstacles. Ces facteurs de réussite deviennent encore plus cruciaux en temps de crise, où la flexibilité est essentielle. Au Bangladesh, la société iFarmer est l'une des nombreuses start-ups du secteur de la technologie financière (aussi dénommée "Fintech", contraction de "finance" et de "technologie") qui font preuve de cette agilité : elle a conclu un accord avec une plateforme de commerce électronique en moins de cinq jours.
En 2019, la Commission économique des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique (CESAP) et le Fonds d'équipement des Nations Unies (FENU) ont lancé le "Fonds d'innovation FinTech pour les microentreprises et les petites et moyennes entreprises dirigées par des femmes" (en anglais : "Women MSME FinTech Innovation Fund"). Ce Fonds d'innovation a soutenu l’entreprise iFarmer dans le cadre d’un projet visant à faciliter d'accès des micro, petites et moyennes entreprises agricoles à des financements et à des marchés.
Avant la pandémie, ce Fonds d'innovation soutenait la mise en œuvre de l'application numérique iFarmer, qui permet de créer un modèle de partage des bénéfices entre les investisseurs urbains et les femmes rurales entrepreneuses agricoles dans le cadre de l’achat et de l’élevage de bétail. Après un cycle réussi d’exploitation du bétail (élevage et vente), l'investisseur (ou les investisseurs) et la femme entrepreneuse se partagent les bénéfices, tandis qu'iFarmer perçoit une commission de gestion. Grâce au succès du modèle de partage des revenus du bétail et de la chaîne d'approvisionnement créée, iFarmer a commencé à travailler avec des producteurs de légumes et de fruits et prévoit d'ajouter d'autres types de produits à son portefeuille fin 2020.
Ce modèle économique novateur permet non seulement de créer une source de revenus supplémentaire pour les femmes rurales, mais également d’offrir aux investisseurs une option de placement rentable et à impact social.
Avec la pandémie, iFarmer a dû ajuster et accélérer ses plans. Pour les éleveurs, le transport et la vente de bétail sont devenus difficiles. Actuellement, la start-up consulte les éleveurs et le gouvernement par le biais de réunions en ligne afin d'identifier de possibles moyens pour permettre la vente de bétail en toute sécurité. iFarmer propose par ailleurs une aide provisoire, notamment sous forme de produits alimentaires de base, aux agriculteurs de sa plateforme qui n'ont pas d'autre source de revenus.
Les mesures de confinement ont généré de nouvelles opportunités pour la livraison de légumes à domicile. Dans le but de limiter la propagation de la COVID-19, le Bangladesh a restreint les déplacements et l'accès aux zones de grand rassemblement, y compris aux marchés de gros tels que le Karwan Bazaar - le plus grand marché du pays - où les gens viennent acheter des légumes et des produits alimentaires. L'accès à ces marchés étant limité, les gens ont besoin de trouver un autre moyen de s’approvisionner en produits alimentaires.
C'est là que la technologie numérique vient montrer son potentiel.
iFarmer a introduit des produits maraîchers sur sa plateforme pour les agriculteurs à la recherche d'une nouvelle source de revenus. Grâce à la plateforme iFarmer, les maraîchers peuvent accéder à des ressources via le mécanisme du financement participatif (ou "crowdfunding", en anglais) pour cultiver et vendre des légumes.
En l'espace de cinq jours seulement, iFarmer a conclu un partenariat avec Priyoshop.com, une plateforme de commerce électronique, pour vendre des légumes sur sa plateforme (une première). Elle s'est également associée à Truck Lagbe, une start-up spécialisée dans la logistique, pour transporter les légumes des agriculteurs vers les entrepôts de Priyoshop.com. Les clients peuvent commander et se faire livrer des légumes cultivés par les agriculteurs d'iFarmer sur Priyoshop.com. La mise en place de ce nouveau mécanisme d'approvisionnement aurait normalement nécessité des mois de négociation, mais, compte tenu de la nécessité de répondre à des besoins critiques et urgents, ce nouveau mécanisme a été mis en place en un temps record.
L’approche adoptée par iFarmer répond à un besoin critique de livraison de produits d'épicerie et permet dans le même temps d’aider les agricultrices à trouver de nouvelles sources de revenus. Elle témoigne de l'agilité des start-ups et de leur rôle dans le développement de solutions opérationnelles innovantes dans des contextes d'urgence. La société iFarmer a l'intention d'investir dans la mise en place d'une chaîne d'approvisionnement en produits frais efficace, inclusive et guidée par les données. Elle mène par ailleurs des négociations pour créer des partenariats avec d'autres épiceries et services en ligne. Le FENU et la CESAP étudient actuellement les possibilités d'étendre leur soutien financier à iFarmer afin de l’aider à faire avancer ce projet.
iFarmer prévoit, en outre, d’identifier des opportunités qui lui permettraient d’approvisionner les "super magasins" et les épiceries de détail en leur donnant accès à des produits agricoles frais, de qualité et à faible coût directement auprès des agriculteurs.
Article produit en anglais par le FENU et traduit en français par le Bureau de la coordination des activités de développement (BCAD). Pour en savoir plus sur iFarmer, sur le "Fonds d'innovation FinTech pour les microentreprises et les petites et moyennes entreprises dirigées par des femmes" et sur les intervention mises en œuvre par le FENU et le CESAP en réponse à la crise, lisez l'article complet publié à l’origine en anglais ici.