Dans les Caraïbes, l’ONU et ses partenaires aident les femmes à faire face à la discrimination et à la violence
Dans les pays de la région Caraïbes, l’ONU apporte aux jeunes femmes et aux mères célibataires le soutien dont elles ont besoin pour faire face aux difficultés engendrées par la pandémie et réaliser leur potentiel. Nous avons choisi de présenter ici les projets mis en œuvre dans ce cadre par l’ONU à Trinité-et-Tobago et, plus au nord, à Sainte-Lucie.
À Trinité-et-Tobago, les jeunes femmes reprennent le pouvoir sur leur vie
À Trinité-et-Tobago, depuis plus d'un siècle, le foyer pour filles de St. Jude sert de refuge pour les filles placées dans le système de soins publics. Certaines de ces filles ont été mises en détention provisoire pour des affaires judiciaires en cours, tandis que d'autres ont abandonné leur scolarité et ont besoin d'une aide psychologique pour les aider à surmonter un traumatisme ou un épisode de dépression. La plupart d’entre elles n'ont pas obtenu de diplôme d’études, ce qui les désavantage au moment de quitter le foyer St. Jude, à l'âge de 18 ans, alors qu’elles n’ont nulle part d’autre où aller.
Kylise Romain, 21 ans, connaît bien ces difficultés. Elle est arrivée à St. Jude à l'âge de 13 ans à un moment où elle battait constamment avec d’autres élèves de son école. "À l'école primaire, on se moquait beaucoup de moi et je me faisais très souvent agressée à cause de mes cheveux et de la couleur de ma peau", raconte-t-elle. "Mes parents ne comprenaient pas ce que j’endurais". Mme Romain explique qu'elle avait fini par réagir à ces intimidations en se mettant elle-même à intimider ses camarades.
À l’âge de 14 ans, elle a quitté St. Jude à s'est retrouvée embarquée dans une relation violente.
"J'ai vu de mes propres yeux ce qui arrive aux filles qui quittent St. Jude sans avoir nulle part où aller et en étant désœuvrées. Elles deviennent une cible facile, on leur manque de respect, on les viole, tout cela parce qu’elles ont besoin de garder un toit sur la tête", déplore Kylise Romain.
Aujourd'hui étudiante en troisième année de psychologie, Mme Romain est déterminée à aider les autres filles de St. Jude à ne pas se retrouver dans la même situation que celle dans laquelle elle s’est elle-même retrouvée. Elle est devenue marraine dans le cadre d’un programme de formation baptisé NiNa Young Women's Leadership (en français : Programme "Nina" pour la formation des femmes au leadership), qui aide les pensionnaires de St. Jude à acquérir les compétences dont elles auront besoin au moment de quitter le foyer, que ce soit pour gérer leur vie de tous les jours ou pour gérer une affaire. Ce programme bénéficie du soutien de l'Initiative Spotlight, un partenariat entre l'ONU et l’Union européenne qui œuvre pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles. Il est géré par la Fondation Cleopatra Borel, une organisation qui promeut l'autonomisation par le sport et l'éducation.
En décembre 2020, un atelier en quatre parties intitulé "Choices : Consequence is No Coincidence" (en français : "Les conséquences de nos choix ne sont pas des coïncidences") a été lancé dans le cadre de ce programme soutenu par l'Initiative Spotlight. Les sujets abordés portent notamment sur les relations, la sexualité, la gestion de carrière et le pouvoir de la réflexion.
Mme Romain est ravie de participer à ce programme :
"Cela me fait du bien de pouvoir partager mon expérience avec les filles. Je suis contente quand elles s'ouvrent à moi et me racontent leur histoire. Je les admire et je suis impressionnée par leur capacité à construire le récit de leur histoire. C’est un exercice très difficile pour des adolescentes et, pour moi, le programme "NiNa" y est pour beaucoup.
Avec l’appui de l’Initiative Spotlight à Trinité-et-Tobago, ONU Femmes travaille avec le gouvernement à la finalisation et à l'adoption du Plan d'action stratégique national contre la violence de genre et la violence sexuelle, ainsi qu’au renforcement des services de justice et de police, à la planification d’activités de prévention primaire au niveau des communautés et au renforcement des capacités de la société civile. Le PNUD travaille avec le système judiciaire et les services de police pour aider les femmes ayant survécu à des violences à accéder à ces services. De son côté, l'UNICEF aide ses partenaires à développer un protocole permettant de prévenir et de traiter les cas de violence sur enfant et de renforcer le pouvoir des tribunaux des affaires familiales. L'OPS est mobilisée quant à elle pour apporter son appui aux systèmes de santé afin d'optimiser les soins et les services d’aide aux survivantes.
À Sainte-Lucie, les mères célibataires puisent dans leur "force intérieure"
Les mères célibataires doivent surmonter de nombreuses difficultés depuis le début de la pandémie. Elles sont souvent obligées de choisir entre s'occuper de leurs enfants et gagner de l'argent pour les faire vivre. Les cours scolaires en présentiel ayant été annulés, elles doivent assurer, en plus, la supervision des cours en ligne. Les opportunités d’emploi, déjà rares en temps normal, sont désormais introuvables, quel que soit le secteur. Aujourd'hui, beaucoup de mères célibataires se demandent si elles pourront un jour s'en sortir et si cette épreuve aura des répercussions durables sur le bonheur de leurs enfants.
La pression qu’elles ressentent est parfois extrême.
Des dizaines de mères célibataires peu qualifiées ayant des enfants en bas âge peuvent désormais respirer un peu : l’ONU et le gouvernement de Sainte-Lucie ont conclu un partenariat pour les aider à surmonter la crise actuelle et à être mieux équipées pour aborder la période post-COVID-19. Ce partenariat fait partie d'un projet pilote menée dans les Caraïbes orientales par ONU Femmes et d'autres entités de l’ONU dans le cadre d’un programme du Fonds conjoint pour les ODD visant à mettre en place des systèmes de protection sociale universelle adaptables.
Les femmes inscrites à ce projet reçoivent des fonds leur permettant de répondre à leurs besoins élémentaires et bénéficient de soins de jour, de conseils en matière de gestion de carrière, de sessions d'autonomisation et d’un soutien psychosocial.
L’aide qui leur est apportée porte déjà ses fruits. "J'ai appris à reconnaître ma force intérieure", a confié Fleur (nom d’emprunt) une des participantes. Grâce aux nouvelles compétences qu'elle a acquises avec le cours, Fleur a trouvé un emploi alors qu’elle était restée au chômage durant plusieurs années. "Je me sens bien dans la peau de la nouvelle personne que je vais devenir", a-t-elle ajouté.
Outre les difficultés financières, les mères célibataires doivent également gérer des pressions d’ordre psychologique et social. C'est particulièrement vrai pour les femmes qui ont survécu à des violences de genre. Pour elles, les conseils qu’elles reçoivent dans le cadre de ces sessions de formation sont très précieux.
"Ce cours m'a beaucoup appris. Je l'ai mis en pratique à la maison, pour moi et pour mes enfants", a expliqué Alicia (nom d’emprunt), une autre participante.
"Ce cours m'a appris comment élever mes enfants sans leur crier dessus ni leur donner des coups, comment gérer des situations difficiles sans entrer dans une logique conflictuelle."
En apprenant à mieux gérer les difficultés engendrées par la crise, ces mères et leurs familles sont moins susceptibles de compter parmi les victimes de la pandémie. Selon un expert d'ONU Femmes, le soutien apporté par l’ONU est certes utile pour les femmes et leurs familles, mais il est l’est aussi pour l’économie toute entière.
"Disposer d’un système de protection sociale solide qui tienne compte des questions de genre est fondamental pour bâtir une économie résiliente", a déclaré Isiuwa Iyahen, Spécialiste des programmes à ONU Femmes.
"Lorsque les femmes et les hommes peuvent bénéficier équitablement de ces services, en temps normal comme en temps de crise, nos économies deviennent résilientes."
La version originale de l’histoire rapportée de Sainte-Lucie a été écrite par Julie Xavier pour ONU Femmes, du Bureau multipays pour les Caraïbes et initialement publiée sur le site Web du Fonds conjoint pour les ODD. La version originale de l'histoire rapportée de Trinité-et-Tobago a été écrite par Tracy Chimming Lewis et publiée à l'origine le 15 février 2021 sur le site Web de l'Initiative Spotlight. Ces versions ont été éditées par Paul VanDeCarr, du Bureau de la coordination des activités de développement (BCAD) avant d’être publiées sur le site du Groupe des Nations Unies pour le développement durable. Elles ont également été traduites en français par le BCAD. Pour en savoir plus sur l’action menée par l’ONU dans ces pays et territoires, consultez le site Web du Bureau multipays de l’ONU à Trinité-et-Tobago et le site Web du Bureau multipays de l’ONU pour les Caraïbes orientales.