La pandémie de l'ombre : L'ONU se mobilise en Inde pour contrer la montée de la violence faite aux femmes et aux filles

En début d'année, dans une plantation de thé située au nord-est de l'Inde, une femme que l‘on appellera Manjita (ce n'est pas son vrai nom) s'est retrouvée en danger. La propagation de la COVID-19 avait entraîné des fermetures d'entreprises et Manjita s’était retrouvée isolée chez elle avec un conjoint violent, coupée de tout accès à des services ou réseaux de soutien.
Une nuit, après avoir été battue par son mari, Manjita a été contrainte de quitter son domicile. N'ayant nulle part où aller, elle a demandé de l'aide à un des Clubs Jugnu.
Les Clubs Jugnu sont des associations d’autonomisation constituées de femmes cueilleuses de thé et d’ouvrières d'usine dans les plantations de thé d’Assam. Un certain nombre de clubs Jugnu d’Assam bénéficiant de l’appui d'ONU Femmes, contribuent à rendre le travail accessible et plus sûr pour toutes les femmes et les filles.
Lorsque Manjita a pris contact avec les membres du Club Jugnu, ces derniers l'ont immédiatement aidée en lui offrant un abri dans l'un de leurs foyers de nuit. Ils l'ont ensuite aidée à déposer une plainte auprès de la police et ont parlé au mari et aux membres de sa famille en présence d'agents de police.
Le terme "Jugnu" signifie "lucioles". Les clubs portent ce nom en référence au rôle de porteuse de flambeau que jouent les femmes pour transformer leur vie et celle des autres. Les clubs Jugnu sont un espace sûr où les femmes et les filles peuvent partager leur expérience et leurs préoccupations. On y conduit également des activités d’éducation à travers la mise en scène de sketches pendant les festivals, l’organisation de réunions communautaires, des projections de films, etc. Ce sont également des lieux où les femmes et les filles bénéficient de conseils pour être plus en sécurité sur leur lieu de travail, dans les plantations de thé.

Pendant la pandémie de COVID-19, les clubs ont renforcé leur réseau d’aide de manière à pouvoir répondre à des besoins accrus. Outre l’appui apporté à ces clubs, ONU Femmes a élaboré un Cadre mondial pour la sécurité des femmes dans les espaces ruraux en s'inspirant des expériences des femmes travaillant dans le secteur du thé.
La "pandémie de l'ombre" gagne du terrain
Les entités de l’ONU travaillent depuis longtemps à l’élimination de la violence de genre. Aujourd'hui, ce travail est plus nécessaire que jamais. "La pandémie de COVID-19 a bouleversé la vie et détérioré les moyens de subsistance de millions de personnes ", a déclaré Argentina Matavel Piccin, Représentante du FNUAP en Inde.
"A l’ombre de la COVID-19 se cache une pandémie de violence de genre. La flambée de violence à laquelle on assiste est peu visible en raison des restrictions de déplacement et de la limitation de l’accès aux services essentiels. Nous devons faire face à ces deux crises en même temps".
Le réseau des "guichets uniques" créé par le gouvernement pour venir en aide aux femmes confrontées à des actes de violence est lui aussi actif pendant la pandémie de COVID-19. Situé dans la ville de Cuttack, dans l'est du pays, l'un de ces centres propose aux femmes des services d'hébergement d'urgence, de conseil et d'orientation. Soumya Sahu, une employée du centre, raconte : "J'écoute les survivantes, j’essaie de comprendre leur histoire, je les conseille et je m'assure que le personnel du centre est en mesure de leur fournir tous les soins et l’aide nécessaires".
C'est là un travail important que les guichets uniques ne peuvent pas faire seuls. C'est pourquoi ces derniers ont établi un partenariat avec les forces la police, l'autorité des services juridiques du district, les groupes d'entraide entre femmes et les étudiants universitaires par le biais des centres de garde d'enfants ruraux. Ils ont également reçu l’appui du FNUAP, qui a dispensé des formations au personnel des centres de crise, aux professionnels de santé et à d’autres agents sur les services d’aide aux femmes victimes de violence, entre autres.
"La violence à l’égard des femmes n'a jamais cessé pendant cette crise", affirme Soumya. "Nous avons laissé notre centre ouvert et avons continué à travailler même pendant le confinement. Mes collègues et moi-même nous rendons régulièrement dans les écoles, les collèges, les instituts de soins infirmiers et les quartiers pour discuter avec les gens et organiser des formations sur la question du genre.
Amrita, membre actif d’un club Jugnu, explique que le confinement lié à la COVID-19 est synonyme de plus grand isolement, d’un accès réduit aux services d’aide et d’une incidence accrue d’actes de violence domestique. "La sensibilisation est le seul moyen dont nous disposons pour agir", explique-t-elle. "Les gens doivent savoir ce qu'est la violence domestique et ce que sont les mesures à prendre pour que les femmes puissent travailler dans un environnement sûr".”
"Tout le monde a un rôle à jouer", déclare Susan Jane Ferguson, Représentante d’ONU Femmes en Inde.
"Le gouvernement indien ainsi que les associations de femmes, les militantes communautaires, les entités de l’ONU et les personnes engagées pour cette cause travaillent sans relâche pour lutter contre la violence à l'égard des femmes et des filles. Nous devons redoubler d'efforts pour éliminer définitivement cette pandémie de l'ombre qu’est la violence de genre".
Article produit par l’ONU en Inde, avec l’appui éditorial de Paul Vandecarr, du Bureau de la coordination des activités de développement. Pour en savoir plus sur les activités menées par l'ONU dans le pays, consultez le site https://in.one.un.org/.














