Les jeunes au rendez-vous pour le 75ème anniversaire de l’ONU : Une nouvelle génération porte le flambeau des valeurs de l'ONU
Le 21 septembre 2020, des représentants de jeunes prendront la parole lors de la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale, à l'occasion du 75ème anniversaire de l'ONU. Ils feront un résumé des discussions et présenteront les conclusions qui s’en seront dégagées. Avant l'événement, ONU Info s'est entretenu avec des animateurs de groupes de jeunes renommés, afin de comprendre quel monde il souhaitent pour l’avenir, comment ils envisagent le rôle de l'ONU dans les décennies à venir et quels sont leurs espoirs et leurs craintes.
"Nous allons avoir besoin de femmes très dévouées pour nous sortir de ce désastre"
Leah Namugerwa co-dirige la section ougandaise du groupe d’activistes pour l’action climatique Fridays for Future ("Des vendredis pour l’avenir"). Agée de 16 ans, elle a déjà mené une campagne pour la plantation d'arbres, lancé une pétition pour faire respecter l'interdiction des sacs en plastique en Ouganda et fait partie d’un groupe d’intervenants exclusivement féminin pour s’exprimer sur les orientations futures des Nations Unies.
"En tant qu'adolescente originaire d'un pays du tiers monde, je crains pour mon avenir et pour celui des générations futures, compte tenu des dégâts de plus en plus importants que l'humanité cause à notre environnement. Le climat est devenu dangereux et les politiciens ne semblent pas s'en soucier. Je suis très préoccupée par le temps que mettent les dirigeants du monde à réagir face au changement climatique et par le manque de justice climatique.
Heureusement, une nouvelle vague de jeunes activistes est en train de déferler sur le monde. Des jeunes comme Greta Thunberg sont devenus les adultes dans la salle, ce qui m'inspire beaucoup. Nous allons avoir besoin de femmes très dévouées pour nous sortir de ce désastre. Les femmes qui militent pour le climat prennent la tête d’initiatives partout dans le monde et nous montrent que les solutions sont à notre portée.
On a pu constater l'urgence et la rapidité avec laquelle les dirigeants du monde et le secteur privé ont réagi face à la COVID-19. Il est temps d’en faire de même pour la crise climatique. Les gouvernements doivent commencer à dire la vérité aux gens concernant le changement climatique et, surtout, ils doivent déclarer l’urgence climatique.
Je veux que l'ONU fasse davantage pour que les gouvernements soient tenus responsables des injustices et des abus qu'ils commettent à l'encontre de leur propre population et de l'environnement. Il faut donner aux jeunes la possibilité de jouer un rôle actif et le pouvoir d'influer sur les politiques.
L’ONU s'efforce de donner la parole à tout le monde, mais les populations des pays du Sud ne sont toujours pas écoutées. Il est extrêmement compliqué pour une Ougandaise ou un Ougandais qui milite pour le climat de se faire entendre au niveau international. Je demande à l'ONU de nous donner les mêmes moyens de nous exprimer que ceux qu’elle donne à nos homologues dans les pays développés”.
L'ONU reste un symbole d'espoir
Nhial Deng vit depuis dix ans dans le camp de réfugiés de Kakuma, géré par les Nations Unies, au Kenya, après avoir fui une attaque armée perpétrée contre son village en Éthiopie. Aujourd'hui, il est activiste communautaire et il aide les jeunes qui vivent dans le camp à améliorer leur vie grâce à l'éducation, au parrainage et à l'entrepreneuriat social.
"L'ONU essaie d’être plus proche des jeunes, mais il reste beaucoup à faire. Les jeunes devraient participer à toutes les discussions et initiatives de l’ONU, à tous les niveaux, en tant qu'acteurs et contributeurs clés et non pas seulement à une ou deux campagnes ou initiatives. Nous méritons plus qu’un siège dans une réunion : c’est la réunion qui devrait venir à nous et aux communautés les plus vulnérables et les plus touchées.
L’ONU a été créée "pour préserver les générations futures du fléau de la guerre et pour créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect". Malheureusement, les conflits demeurent, la torture n'a pas disparu et les violations des droits de l'homme continuent de faire les gros titres. Pourtant, 75 ans après sa création, l'ONU reste un symbole d'espoir pour un grand nombre de personnes qui se retrouvent souvent sur la touche. Quand les gens fuient leur pays, ils savent qu'en arrivant dans un camp de l’ONU, ils pourront avoir de la nourriture, un abri et des soins médicaux de base.
La plupart d'entre nous conviendront que le sort de l’humanité serait bien plus sombre aujourd'hui si l’ONU n’était pas là pour encourager la coopération internationale et empêcher que les guerres mondiales horribles de la première moitié du XXème siècle se reproduisent. Aujourd'hui, la plupart des problèmes auxquels notre monde est confronté sont mondiaux, la COVID-19 étant l'un d'entre eux. Ils nécessitent donc une réponse globale. Mais toutes les nations doivent montrer leur intention véritable et authentique de s'unir pour la paix et pour un avenir durable pour notre planète.
Si on veut s'assurer que l’ONU demeure utile, les processus démocratiques internes à l’ONU doivent être revus. L'ONU doit être plus démocratique, plus transparente et beaucoup plus facilement accessible à tous, en particulier aux communautés défavorisées, de manière que n’importe quel jeune, qu’il vive dans un camp de réfugiés, dans un bidonville ou dans une communauté autochtone, puisse être pleinement représenté"”
Je veux un monde d'égalité des chances
Cécile Mawe est la fondatrice et présidente de JADD, une organisation de jeunes qui plaide pour le développement durable au Cameroun.
On compte parmi les initiatives récentes de JADD un projet dans le sud du pays, soutenu par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui vise à améliorer les moyens de subsistance des femmes des villages bantous, en promouvant des techniques agricoles durables.
"Je veux un monde où les hommes et les femmes ont les mêmes chances, où les inégalités entre les pays, les peuples et les communautés sont réduites, où les jeunes sont considérés comme des atouts majeurs pour le développement des nations - en particulier en Afrique, où ils représentent environ 60 % de la population - et où les groupes vulnérables sont représentés au plus haut niveau dans les gouvernements.
Les femmes ont beaucoup de potentiel, mais les normes socioculturelles et le fait que ce soit des hommes qui dirigent en Afrique posent encore des défis considérables. Les femmes doivent jouer un rôle majeur au niveau familial et sociétal, si on veut que les objectifs de développement durable soient atteints d'ici à 2030.
Je pense que les Nations Unies donnent la voix aux jeunes, mais je pense qu’elle peut faire plus. 70 % de la population camerounaise est jeune et intelligente. En revanche, seulement 15 % des jeunes ont accès à un emploi dans le secteur public. J'aimerais que l’ONU crée une agence "ONU Jeunes" entièrement axée sur des thèmes qui intéressent les jeunes, comme l'accompagnement de projets - dans des domaines tels que les start-up, l'agriculture durable, l'agro-industrie et l'informatique - ou le mentorat financier et technique.
Aujourd'hui, beaucoup de pays, dont le Cameroun, souffrent de problèmes tels que les conflits armés et les guerres civiles, la mauvaise gouvernance, les guerres commerciales et une inégalité croissante. Je veux que l’ONU trouve de nouvelles stratégies, adaptées à chaque pays, qui apportent la paix et la sécurité, fassent de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes une réalité et fassent en sorte que les groupes vulnérables de la société, notamment les populations autochtones, occupent des postes de direction et de décision".