Rien n’est impossible : À mesure que les femmes prennent part au pouvoir en Sierra Leone, l'avenir s'éclaircit
Par moments, les problèmes qui rongent l’Afrique de l'Ouest et la région du Sahel sont si profonds et si complexes qu'ils semblent impossibles à résoudre.
Changement climatique. Corruption. Chômage des jeunes. Services sociaux insuffisants. Conflits intercommunautaires.
Il serait trop facile d'abandonner. Alors, là où beaucoup ne voient qu’une crise sans issue, les Nations Unies, elles, voient une opportunité. L’action menée par l'ONU en Sierra Leone s’est complexifiée cette année avec la pandémie de COVID-19 pandemic. L'Organisation aide le gouvernement à répondre à la pandémie en assurant l’acheminement de fournitures médicales, en travaillant avec les agriculteurs pour les aider à doubler leur productivité et leurs revenus, en déployant des experts en questions de genre dans cinq districts pour faire en sorte que les problématiques de genre soient prises en compte dans les plans de réponse et en distribuant des fournitures vitales et de la nourriture aux personnes les plus vulnérables. L'équipe des Nations Unies a apporté son appui au programme national d'alimentation scolaire, lequel a bénéficié à 330.000 enfants dans 11 districts.
"Une solution qui laisse la moitié de la population de côté..."
Les habitants de la Sierra Leone sont confrontés à de nombreux problèmes, notamment à la pauvreté et à des conflits provoqués pour partie par la diminution des ressources naturelles due au changement climatique. Les pays du Sahel eux aussi sont confrontés à ces problèmes.
Ces conflits sont souvent dus à des différends sur les droits fonciers. En effet, dans certains cas, la question se pose de savoir où commence une propriété et où se termine une autre. Ces problèmes semblent souvent mineurs, mais, en réalité, ils reflètent des tensions durables et plus importantes liées aux différences entre classes sociales, au droit de propriété et aux droits fonciers.
Parfois, ces litiges dégénèrent en violences et déclenchent des vagues de violence encore plus importantes.
"Ce n'est pas une coïncidence si ces problèmes surviennent et s'aggravent et que dans le même temps les femmes sont victimes de discrimination", déclare Nyabenyi Tito Tipo, Représentante de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) in Sierra Leone. en Sierra Leone. "Une solution qui laisse la moitié de la population de côté est nécessairement vouée à l'échec".
C'est précisément pour cette raison que le gouvernement a mis en œuvre un programme destiné à former aussi bien des femmes que des hommes à assumer des rôles de premier plan dans les domaines de la consolidation de la paix, de l'agriculture, de l'entreprenariat et de la gouvernance. Ce programme est mis en œuvre dans quatre districts du pays et bénéficie du soutien du (Fonds du Secrétaire général des Nations Unies pour la consolidation de la paix), de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et de l'Organisation internationale du Travail (OIT).
Femmes et paix
Le projet consiste à former les acteurs locaux de sorte qu'ils deviennent des artisans de la paix dans leurs communautés d'origine. À ce jour, 80 "observateurs communautaires de la paix et des conflits" ont été formés pour agir dans leurs villages et leurs villes afin de repérer les signes laissant présager qu’un conflit pourrait dégénérer en violences.
"Nous avons appris à voir les étincelles avant qu'elles ne se transforment en feu, en termes métaphoriques", explique Susan Pessima, qui a participé à la formation de la chefferie de Selenga, dans le district de Bo. "C'est important, car les incendies peuvent se propager rapidement si les conditions sont favorables".
"Le rôle des femmes dans la construction de la paix est essentiel et on doit leur donner les moyens de devenir autonomes", insiste-t-elle.
"Nous, les femmes, nous connaissons bien nos communautés. Nous passons du temps dans nos foyers, dans les marchés. Nous sortons dans les rues. Nous voyons des choses que les autres ne voient pas".
Pour accomplir leur mission, ces 60 femmes et ces 20 hommes ont reçu l’aide de 800 autres personnes qui ont été formées aux questions relatives au genre et aux droits fonciers. Une campagne d’information s’appuyant sur des jingles, des programmes radio, des brochures et des affiches imprimées en plusieurs langues a également été réalisée dans le cadre de ce projet.
Ce même engagement est à l'œuvre dans le domaine de l'égalité des sexes, puisque de jeunes femmes et de jeunes hommes reçoivent une formation pour devenir des topographes auxiliaires. Face aux conflits potentiellement violents dus à l'accaparement des terres en Sierra Leone, le gouvernement a fait de la cartographie des droits fonciers coutumiers une priorité. Ainsi, plus de 320 stagiaires ont travaillé en associant les dernières technologies géospatiales à du gravier à l’ancienne, marché dans d'épaisses forêts, escaladé des collines et traversé des marécages pour cartographier les limites de plus de 20.000 acres de terres.
Femmes et pouvoir décisionnel
Ce projet permet d’impliquer des femmes non seulement dans la recherche de solutions pacifiques, mais aussi dans les processus décisionnels. Des femmes ont ainsi été nommées à la moitié des postes dans les 16 "comités fonciers villageois" créés dernièrement dans les districts participants ; et, dans deux villages, pour la première fois, une femme est devenue cheffe de village.
L’ONU a soutenu la dispensation d’une autre formation visant à réunir les chefs suprêmes, les dirigeants locaux et les Reines mères dans un certain nombre de chefferies pour donner aux femmes les moyens de mener à bien la politique foncière nationale du gouvernement.
Desmond Kangobai, chef suprême de la chefferie de Selenga, dans le district de Bo, a participé à cette formation. Il explique que le message délivré lors de cette formation était fort et que les conseils pratiques qui ont été donnés aux participants étaient utiles.
"Si nous voulons une paix et une prospérité durables dans nos communautés, alors les femmes doivent être impliquées à tous les niveaux de l’échelle décisionnelle et tout au long du processus de prise de décision".
Femmes et génération de revenus
Dans leur travail, les agricultrices rencontrent plus de difficultés que leurs homologues masculins, car elles sont susceptibles d'être victimes de discrimination au niveau des services financiers - un facteur important de pauvreté. Le programme mis en œuvre dans les quatre districts participants a également permis de former près de 1.000 agriculteurs, dont 85 % de femmes, à la finance et à la gestion de coopératives. Les participants ont constitué des coopératives villageoises d'épargne et de crédit pour se soutenir mutuellement.
Les membres de ces coopératives peuvent obtenir de petits prêts pour couvrir des dépenses telles que les frais de scolarité ou les factures médicales sans avoir à vendre du matériel agricole ou d'autres actifs. Cela signifie qu'ils peuvent générer plus de revenus pour prendre en charge leur famille. Grâce à des programmes soutenus par l’ONU, huit nouvelles coopératives agricoles sont désormais enregistrées auprès du gouvernement.
En outre, 2.500 personnes - dont 80 % de femmes - ont reçu une formation aux bonnes pratiques en matière d'agronomie et d'agriculture, notamment pour la culture de l'arachide, du manioc, du riz et du poivre. Avant cette formation, la plupart des agricultrices pratiquaient l'agriculture sur brûlis, une technique qui peut être plus rentable à court terme, mais qui détériore la terre et l'environnement à long terme. Grâce à une formation aux techniques de l’agriculture intelligente face aux changements climatiques, les agriculteurs participants ont acquis des compétences en matière de plantation, de paillage et de gestion des sols et de l'eau. Dans le cadre de ce projet, des émissions de radio ont également vu le jour et des documents ont été produits et imprimés dans plusieurs langues.
Imaginer un avenir meilleur pour la Sierra Leone
Les responsables du programme de formation et les participants affirment qu'ils sont plus optimistes que jamais quant aux perspectives d'avenir pour leurs villages et leur pays.
"J'ai beaucoup appris au cours de cette formation et j’en suis très content", déclare le chef suprême Desmond Kangobai. "Il est tout aussi important que le gouvernement et l’ONU affirment l’importance du rôle des femmes dans la construction de l'avenir du pays".
Nyabenyi Tito Tipo, de la FAO, ajoute : "La solution aux problèmes de la Sierra Leone et du Sahel est à la fois simple et très compliquée. Les femmes. Les femmes doivent pouvoir être autonomes. Et les hommes doivent accepter que les femmes partagent le pouvoir. Il n'y a rien que nous puissions faire si nous ne le faisons pas ensemble".
Produit en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix. Écrit par Fatimah Inayet, du Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix et Céline Adotevi, du Bureau de la coordination des activités de développement, avec le soutien éditorial de Paul Vandecarr, du Bureau de la coordination des activités de développement. Nous remercions tout particulièrement l'équipe de pays des Nations Unies en Sierra Leone pour son appui.