Une campagne mobile pour augmenter le nombre des naissances déclarées au Belize, y compris en temps de COVID-19
À Aguacate, un petit village Q'eqchi'-Maya du sud du Belize, Erma Cus et son mari célèbrent avec un grand sourire aux lèvres l’arrivée de leur fils dans leur vie et leur communauté.
"Nous avons déclaré la naissance de notre fils il y a des années, mais l'acte de naissance n'est jamais arrivé. Nous sommes heureux parce que maintenant, avec un certificat de naissance, les choses vont devenir plus faciles pour lui à mesure qu'il grandira", se réjouit Erma, dont le fils a désormais presque 5 ans.
L'enregistrement des naissances est un droit humain fondamental. Pourtant, au Belize, 4 % de la population n'est pas enregistrée et 14 % de celles et ceux qui sont enregistrés n'ont pas de certificat de naissance.
Il existe par ailleurs d'importantes disparités entre les districts du pays en matière d'enregistrement des naissances. Ainsi, selon les statistiques de l'état civil du Belize, en 2018, moins de 50 % des enfants nés vivants dans le district de Toledo ont été enregistrés, ce qui signifie que la majorité des enfants nés dans ce district ne sont pas comptabilisés dans la population.
Un enfant qui n’a pas de certificat de naissance n'a pas d'identité et "n'existe" pour ainsi dire pas. Les enfants sont particulièrement vulnérables et n'ont pas accès aux services sociaux de base. Il est donc plus difficile pour leurs parents de les inscrire à l'école, de les emmener chez le médecin ou de leur faire accéder à une aide financière en cas de besoin.
De plus, les enfants qui n'ont pas de certificat de naissance sont de facto davantage exposés au risque de subir des abus et d’être victimes d’exploitation ou d’actes de violence. Ils sont notamment plus vulnérables face au mariage forcé, à la traite des êtres humains et à l'apatridie.
En un mot, sans certificat de naissance, les enfants sont privés de leurs droits.
Pourquoi les enfants ne sont-ils pas enregistrés ?
Plusieurs raisons sont à l’origine du non-enregistrement des enfants, que ce soit au Belize ou dans le reste du monde. Comme c’est le cas pour le fils d’Erma, cela est parfois dû à des insuffisances dans le système de l'état civil. Dans d'autres cas, les parents ne sont informés ni de l'existence d’un système de déclaration des naissances, ni de son importance pour la vie de leurs enfants.
En outre, le coût et l’utilisation du service d’enregistrement représentent souvent un obstacle insurmontable pour les familles. Les parents ne sont souvent pas en mesure d’assumer les coûts liés à l'enregistrement de la naissance, notamment les frais de déplacement vers les bureaux d'enregistrement ou les frais de déclaration tardive. Il arrive aussi qu’ils vivent dans des communautés rurales, comme Aguacate, éloignées des bureaux de l’état civil.
Ce fut le cas justement pour Manuela Tut, qui vit elle aussi à Aguacate.
"J'ai été très heureuse d’apprendre que mon mari et moi avions la possibilité de déclarer la naissance de notre enfant ", confie-t-elle. "Je n'avais pas pu le faire enregistrer plus tôt parce que cela impliquait d’aller à Dangriga [à plus de 150 km d’Aguacate], ce qui nous aurait coûté assez cher", poursuit-elle.
Son fils, qui a tout juste 4 ans, vient d'être enregistré.
Une campagne mobile et ciblée pour dynamiser l'enregistrement des naissances
Produire des messages en espagnol, en anglais, en Q'eqchi' et en Mopan Maya sur l'importance de l'enregistrement des naissances. Les livrer en même temps que les aides d’urgence distribuées aux familles vulnérables pour les aider à surmonter la crise de la COVID-19. Faire en sorte qu'un fonctionnaire désigné de l'Unité des statistiques de l'état civil du Belize soit présent pour faciliter l'enregistrement mobile des naissances. Puis regarder les taux d'enregistrement des naissances s'envoler…. Voilà la formule gagnante pour accroître les taux d’enregistrement des naissances dans le pays.
Après avoir fait deux demandes depuis la naissance de son enfant, Erma tient enfin le certificat de naissance de son fils entre ses mains. C’est, outre sa détermination, la campagne d'enregistrement mobile portée par le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés et l'UNICEF qui a rendu cela possible.
La campagne est mise en œuvre dans les communautés frontalières des zones rurales du sud, de l'ouest et du nord du Belize. Elle vise à atteindre certaines des populations les plus vulnérables du pays, notamment les enfants nés dans les communautés autochtones, les demandeurs d'asile, les réfugiés et les migrants.
À ce jour, 30 communautés ont bénéficié de cette campagne et 201 enfants ont été enregistrés au Belize grâce aux efforts conjoints de l'Unité des statistiques de l'état civil du Belize, du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).
Que peut-on faire pour améliorer les taux d'enregistrement des naissances
L'amélioration des taux d'enregistrement des naissances peut se faire de plusieurs manières. Par exemple, en éliminant les frais d'enregistrement tardif. En augmentant le nombre d'officiers d'état civil formés. Et en les envoyant dans des régions éloignées, dans des unités d'enregistrement mobiles. La campagne d'enregistrement mobile soutenu par l’ONU au Belize a montré que cela était possible.
Pour parvenir à réaliser l'enregistrement universel des naissances dans le pays, l'UNICEF et le HCR demandent un système d'enregistrement des naissances qui soit accessible à tous les parents - y compris dans les régions les plus reculées - qui permette l’enregistrement tardif des naissances sans frais supplémentaires et qui soit gratuit pour tous.
Le Comité des Nations Unies pour les droits de l'enfant a vivement recommandé au Belize de rendre l'enregistrement des naissances gratuit à tous les stades du processus. L'UNICEF et le HCR sont profondément préoccupés par le fait que le Belize vient d'augmenter le montant de l'amende pour enregistrement tardif (12 mois après la naissance).
Pourquoi favoriser l'enregistrement des naissances en pleine pandémie ?
Les enfants dont la naissance n’a pas été déclarée ne peuvent prouver ni leur nom ni leur nationalité. En termes juridiques, ces enfants n'existent pas et cela peut avoir des répercussions tout au long de leur vie.
C'est pourquoi l'enregistrement des naissances est vital pour les enfants, tous les enfants, en tout temps et en toute circonstance.
"En tant que membre du Comité directeur national pour l'enregistrement des naissances, le HCR s'engage à lutter contre les situations qui peuvent conduire à l'apatridie et encourage la réalisation de toutes les démarches nécessaires en vue de l'enregistrement non seulement de chaque enfant réfugié, mais aussi de chaque enfant né au Belize", a déclaré Kerrie Williams, assistante principale pour la protection au HCR.
Michel Guinand, spécialiste des politiques à l'UNICEF, coordinateur de programmes et spécialiste des politiques sociales, a lui aussi souligné l'importance pour chaque enfant d'avoir un certificat de naissance : "Un certificat de naissance est la première ligne de défense d'un enfant contre le mariage forcé, la traite des êtres humains et l'apatridie. De plus, l’existence de statistiques d'état civil de qualité est essentielle pour guider l’élaboration de politiques et programmes nationaux".
Dans le contexte particulier de la COVID-19, une fois les restrictions levées, les parents d’enfants non enregistrés se heurteront à un certain nombre d'obstacles ; par exemple, lorsqu'ils auront besoin d’accéder, pour leurs enfants, à des services publics tels que les soins de santé, l'aide humanitaire, l'aide financière ou d'autres services sociaux.
C'est la raison pour laquelle l'enregistrement des naissances est plus pertinent que jamais.
Cet article a été publié à l'origine en anglais sur le site web de l’ONU au Belize. Pour en savoir plus, consultez le site https://belize.un.org/.