Travail des femmes : Au Mexique, l’ONU s’emploie à protéger les travailleuses journalières agricoles

Il est 5 heures du matin. Ceferina Apreza, une travailleuse journalière ("jornalera", en espagnol) migrante de 30 ans commence sa journée dans le sud de Jalisco, au Mexique. Sa famille et elle vivent dans un abri et travaillent dans des champs de légumes et de canne à sucre, aux côtés d'autres familles de jornaleras originaires de différentes régions du pays, principalement du sud du Mexique.
Pour Ceferina, la journée de labeur commence dès le réveil de son fils et ses trois filles, qu’elle doit préparer pour l'école - ce qui est plus difficile maintenant à cause de la pandémie. Ceferina prépare ensuite le petit-déjeuner et le repas qu'elle emportera avec elle dans les champs. Elle se prépare enfin pour aller travailler, prend avec elle un chapeau qu’elle porte pour se protéger du soleil ainsi qu’un mouchoir qu’elle utilise pour essuyer sa sueur et se protéger le visage de la poussière.
Comme près de 30.000 femmes de Jalisco, Ceferina travaille dans les champs : elle plante, récolte et emballe les fruits et légumes qui arrivent ensuite sur la table de milliers de familles au Mexique et à l'étranger.
Des protections insuffisantes pour les femmes

Les travailleuses agricoles journalières migrent de leur lieu d'origine à la recherche d'opportunités de travail. Mais les emplois qu’elles trouvent sont souvent informels, ce qui les prive d’avoir un contrat de travail en bonne et due forme, un salaire juste et un accès aux services de santé et de garde d'enfants, à une retraite, à des congés de maternité, à des congés payés, à des primes de Noël et aux autres prestations que la loi garantit habituellement.
Selon les statistiques officielles, seuls 3 % des travailleurs agricoles journaliers mexicains, qu’ils soient hommes ou femmes, ont un contrat de travail écrit et 91 % de ces travailleurs n'ont accès à aucune prestation sociale.
L'écart entre les sexes est abyssal. Au Mexique, selon une étude de 2015 conduite par le gouvernement, seules 3 femmes jornaleras sur 10 sont rémunérées pour leur travail. Ce pourcentage est jusqu'à un tiers inférieur à celui de leurs homologues masculins, même si les femmes travaillent le même nombre d'heures que les hommes.
En plus de travailler dans les champs, les femmes jornaleras, comme de nombreuses femmes employées dans d'autres secteurs, assument des responsabilités familiales domestiques, ce qui les amène à effectuer des doubles, voire des triples journées de travail non rémunérées. Le moment et la durée de leurs périodes de repos dépendent des saisons de récolte : pendant la période de récolte de la canne à sucre, par exemple, elles travaillent également le dimanche.
Pour une famille dont la seule source de revenus est le travail agricole, l’accès à la nourriture devrait être garanti. Or, pour la famille de Ceferina, la seule nourriture qui soit garantie est celle provenant des restes des récoltes. Les membres de la famille doivent se procurer ailleurs la nourriture qui leur manque, mais les petits salaires qu’ils gagnent sur les champs ne suffisent pas et cela a des effets néfastes sur leur alimentation.
L’emploi informel dans les zones rurales se traduit non seulement par une injustice salariale, mais aussi par des effets négatifs sur l'éducation et la santé, entre autres. Compte tenu du fait que les contrats formels sont peu nombreux, l'accès à la sécurité sociale est extrêmement limité. Seuls/es quelques travailleurs/euses sont enregistrés/ées dans le système de sécurité sociale et celles et ceux qui ont un logement ne peuvent y avoir recours que pendant la saison des récoltes. Une fois celle-ci terminée, les travailleurs/euses sont licenciés/ées, même s'ils/elles continuent à effectuer d'autres tâches dans les mêmes champs. Lorsqu'ils/elles tombent malades, ils/elles doivent se rendre dans des hôpitaux privés ou des pharmacies qui proposent des soins médicaux, sans compter que la maladie, en elle-même, a pour effet de réduire davantage encore leurs ressources économiques.
Combler les écarts pour que les femmes ne basculent pas dans la pauvreté

Pour répondre aux vulnérabilités auxquelles sont confrontées les femmes jornaleras, le système des Nations Unies promeut la mise en place de protections sociales par le biais d'un programme conjoint intitulé "Combler les écarts" (en anglais : "Closing gaps"). Financé par le Fonds conjoint des Nations Unies pour les ODD, ce programme est mis en œuvre par l'Organisation internationale du Travail (OIT), l'Entité des Nations unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes) et l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).
La stratégie de protection sociale élargie permettra aux femmes jornaleras de connaître leurs droits en matière d’emploi, de santé et d'éducation, de revendiquer ces droits et de les faire valoir. Elle permettra également aux entreprises et au gouvernement d'adopter des politiques et des programmes qui garantissent l'exercice de ces droits.
Si les femmes rurales avaient le même accès aux ressources agricoles, à l'éducation et aux marchés que les hommes, moins de personnes souffriraient de la faim.
Ceferina souhaite que davantage de personnes reconnaissent le caractère essentiel du travail que font les femmes comme elle.
"Qu'ils voient le travail et les efforts que nous (les femmes jornaleras) faisons, car ce n'est pas rien, c'est même beaucoup", dit-elle. "Nous travaillons pour le Mexique, pour l'améliorer".
Une première version de cet article a été publiée en espagnol sur le site de la FAO au Mexique. La présente version a été écrite en anglais avec l’appui éditorial de Paul VanDeCarr, du Bureau de la coordination des activités de développement (BCAD) et traduite en français par le BCAD. Pour plus d'informations sur les programmes de l’ONU axés sur la protection sociale, consultez cette page du Fonds conjoint pour les ODD. Pour connaître les résultats de nos activités dans ce domaine et dans d'autres, consultez le Rapport de la Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement durable sur le BCAD.