"Ton heure est venue" : Au Nigéria, l’ONU vient en aide à des populations exposées à d’effroyables violences
20 août 2021
Légende: Orisa (nom changé pour des raisons de confidentialité) tient son bébé dans les bras. Elle a échappé à la mort lors d’une attaque de l'insurrection de Boko Haram.
Vivre dans le nord-est du Nigéria est périlleux : un conflit y sévit depuis longtemps, des mines terrestres et des munitions non explosées menacent et l’insurrection de Boko Haram a forcé des millions de personnes à fuir leur foyer.
La violence est telle, dans cette région, qu'il est parfois difficile de se souvenir de ce qu’était la vie avant ou d'imaginer ce qu’elle pourrait être après.
"Ton heure est venue": un épisode de violence effroyable
Prenez l'histoire d'Orisa (nom d’emprunt). Orisa vit dans l'État de Borno, où Boko Haram est apparu, en 2002. Elle se souvient du jour, il y a quelques années, où des visiteurs indésirables sont venus frapper à sa porte. C'était un mardi à 8 heures et son mari, un "Babulama" (ou chef de communauté), était en train de se reposer.
Orisa a appris que des membres de Boko Haram étaient dans le village.
"Nous sommes sortis. Un homme de Boko Haram a dit à mon mari : "Babulama, ton heure est venue".
Le mari d'Orisa s'est mis à courir. "Ensuite, dix membres de Boko Haram sont venus chez nous", se souvient Orisa. "Je tenais ma petite fille dans les bras. Je criais et les enfants criaient aussi. L'un des membres de Boko Haram tenait mon fils et un autre me tenait moi. L'un d'eux a dit : "Achève-le" et a tiré sur mon mari. J'étais assise et je hurlais. J'étais enceinte de 4 mois et j'ai commencé à saigner".
Mais son mari était encore en vie, alors un autre membre de Boko Haram a dit : "Ce Babulama n'est pas mort. Vas-y, tire-lui dessus à nouveau." L’homme a tiré à nouveau et le visage du mari d'Orisa s’est désintégré sous l’effet du tir.
"Je me suis précipitée vers lui, en pleurant, alors le tireur m'a dit : "Ce n'est pas toi que j'ai tuée, c'est ton mari. Tu devrais rentrer chez toi". Mais Orisa a tenu bon, affirmant qu'elle ne partirait pas. L'homme, décontenancé, a sorti son arme.
"J'ai pris mes enfants dans les bras et je lui ai dit de tous nous achever", raconte Orisa, bouleversée à l’évocation de ce souvenir. Un autre membre de Boko Haram a alors conseillé au tireur : "Laisse-la partir, elle mourra bientôt."
En sang, le corps tuméfié, Orisa a fui son village en tenant un de ses fils et en portant l’autre sur le dos. En chemin, "je tombais et je me relevais, jusqu'à ce que j'atteigne le village de Monguno". Orisa était malade et affamée, mais elle ne pouvait rien manger.
Le sentiment de sécurité a été éphémère et même illusoire, car Boko Haram a fini par débarquer à Monguno. Alors, Orisa et ses enfants ont continué à marcher jusqu'au village de Yerwa, dans la capitale de l'État de Borno, Maiduguri.
À partir de là, ils se sont dirigés vers un camp des Nations Unies pour les "personnes déplacées à l'intérieur du pays", c'est-à-pour dire les Nigérian(e)s forcé(e)s de partir de chez eux/elles à cause d’un conflit. Ils ont dû pour cela parcourir une centaine de kilomètres en essayant d’éviter d'être capturés ou de marcher sur des explosifs.
Orisa et sa famille sont un cas parmi beaucoup d'autres. En 2020, plus de 80.000 personnes nouvellement déplacées sont arrivées dans des camps et des communautés d'accueil de l'État de Borno et d'autres États du nord-est.
Renforcer la sécurité : une priorité
Légende: Le Service de la lutte antimines de l'ONU soutient une formation organisée à l’intention des agents des services de la sécurité nationale.
À Maiduguri et dans d'autres parties de l'État de Borno, les organismes de l’ONU s'efforcent de renforcer la sécurité dans le contexte de la crise actuelle.
Le Service de la lutte antimines de l'ONU coordonne l'action de lutte contre les munitions explosives. Il s’agit notamment pour cet organisme de cartographier et marquer les zones dangereuses et de sensibiliser la population aux risques liés aux mines terrestres.
Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) soutient la mise en œuvre de la stratégie du gouvernement en matière de couverture sanitaire universelle en revitalisant les soins de santé primaires. L’Organisation œuvre par ailleurs à l'éradication de la polio et au renforcement de la vaccination de routine dans l’ensemble du pays.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) prend en charge les questions de protection, en apportant à la population une aide d'urgence dans les domaines de l’approvisionnement en eau, de l'assainissement, de la fourniture de produits ménagers, de l’alimentation et des soins de santé et en plaidant pour la mise en place de politiques d’aide aux personnes déplacées.
Ensemble, les organismes de l'ONU travaillent pour qu’un jour, ni les enfants d'Orisa, ni aucun autre, n’ait à faire face aux horreurs qu'Orisa et sa famille ont vécues.
Article écrit à l’origine en anglais par le Service de la lutte antimines de l'ONU avec l’appui éditorial de Paul VanDeCarr, du Bureau de la coordination des activités de développement (BCAD). Traduit en français par le BCAD. Pour en savoir plus sur l’action menée par l’ONU au Nigéria, consultez le site Nigeria.UN.org. Pour connaître les résultats de nos activités dans ce domaine et dans d'autres, consultez le dernier Rapport de la Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement durable sur le BCAD.