Îles Salomon : Encourager la participation des jeunes à la vie politique locale et nationale
Nous publions cet article à l’occasion de la Journée internationale de la jeunesse 2022, qui a pour thème cette année "La solidarité intergénérationnelle : Créer un monde pour tous les âges".
Souvent, les jeunes se sentent incompris ou mal représentés. Partout dans le monde, ce sentiment est largement partagé par la jeunesse. Mais aujourd'hui, les jeunes prennent davantage les choses en main : ils participent à des mobilisations d’ampleur mondiale et s’engagent dans des actions destinées à rendre le monde meilleur.
Forts de cette responsabilité, ils veulent aussi pouvoir prendre des décisions pour leur avenir. Qu’est-ce que cela implique pour les pays du Pacifique Sud, région dont la moitié des habitants ont moins de 23 ans ? Et comment cela se traduit-il aux Îles Salomon, plus particulièrement ?
Dans les villages des îles Salomon, où les anciens gèrent les prises de décisions, Julian Asu, Bartholomew Wanega et beaucoup d’autres jeunes comme eux se demandent comment ils pourraient prendre plus activement part aux processus décisionnels locaux.

Dans les Îles Salomon, les emplois sont rares et l’accès à l'éducation limité au regard des besoins de la jeunesse. Certain·e·s élèves abandonnent leur scolarité pour pouvoir aider leur famille à subvenir à ses besoins ou travailler pour se financer eux-mêmes. D'autres jeunes, en quête d'épanouissement personnel, se sentent démotivés et frustrés. Mais ces jeunes ne restent pas inactifs en attendant qu'on leur tende la main. Beaucoup essaient d’agir sur leur destin en prenant part aux processus décisionnels au niveau de leur commune, de leur province et même du pays.
Pour Julian et Bartholomew, être jeune et vivre dans une commune rurale est toujours allé de pair avec le devoir de donner l'exemple en pesant sur les décisions aux niveaux provincial et national. C'est pourquoi, lorsqu'ils ont appris que leur province figurait parmi les quatre provinces où des caucus de jeunes allaient être créés, ils ont voulu y prendre part.
Julian, aujourd'hui Vice-Présidente du Caucus des jeunes de Purepure, à Weather Coast, reconnaît que le militantisme des jeunes aux Îles Salomon est différent d'ailleurs.
L’accès à Internet étant limité à Weather Coast, les échanges sociaux et l’animation des groupes de jeunes ne se font pas via les outils technologiques classiques et les réseaux sociaux, mais à travers des échanges directs, de visu. C’est ce qu’il s’est passé dans une autre province, où il n'y avait aucune couverture réseau et où les animateurs et les jeunes se sont passé les messages les uns aux autres.

Habitant d’une commune rurale comme 80 % des habitants des Îles Salomon, Julian considère qu’en soutenant les jeunes et en reconnaissant leur valeur et leurs besoins, les leaders politiques aux commandes font un pas dans la bonne direction. Comme dans beaucoup d’autres communes, les jeunes de sa commune ont des perspectives d’avenir très limitées en raison d’un taux de chômage élevé.
La sélection de quatre provinces pour la création de caucus de jeunes s’est faite en réponse à des problématiques précises : que ce soit à Honiara et Weather Coast, dans la Province de Guadalcanal, ou à North Malaita et Shortlands, dans la Province de l’Ouest, les jeunes sont parmi les plus vulnérables du pays car ils vivent dans des communes éloignées et isolées et n’ont souvent pas voix au chapitre dans les processus décisionnels qui ont pourtant un impact direct sur leur vie.
Pour que les jeunes des Îles Salomon puissent réaliser leur plein potentiel, ils doivent avoir des repères sociaux, économiques et politiques. Et c’est justement là l’objectif du réseau mis en place par les caucus de jeunes dans les quatre provinces sélectionnées. Grâce à ce réseau, les jeunes ont d’ailleurs déjà accès à de nouvelles opportunités dans les communes reculées. Pour cette seule année, plus de 500 jeunes à travers les Îles Salomon ont appris à devenir autonomes et à mobiliser les habitants de leurs communes dans le cadre de formations sur les questions liées au leadership, à la consolidation de la paix, à l’efficacité des systèmes de gouvernance, ou encore à l'égalité des sexes.

Bartholomew Michael Wanega est membre et co-fondateur du Caucus des jeunes de Burns Creek. Comme dans d'autres communautés de jeunes, les membres de son caucus ont voté démocratiquement pour élire une équipe de direction, à la tête de laquelle il a été élu président.
Le jeune homme a également pris part à un atelier sur le leadership dans le cadre de la réactivation du Conseil provincial de la jeunesse de Guadalcanal, qui fait remonter les propositions portées par la jeunesse au niveau national. Bartholomew mesure déjà l’intérêt de ces caucus de jeunes et conseils de la jeunesse.
Prendre part aux mécanismes décisionnels
Selon Bartholomew, ce projet a permis aux jeunes de devenir plus autonomes et de se mobiliser aux côtés de leurs aînés plutôt que d'être dépendants d'eux. Il pense que les élus, comme les jeunes mobilisés dans le cadre de ce projet se sont rendu compte de l’intérêt de travailler ensemble. Mais la réactivation des caucus de jeunes et des conseils de la jeunesse ne constituent que la première étape d’un processus nécessaire pour encourager la participation des jeunes à la vie de leur commune. Comme le souligne un des jeunes ayant participé à un atelier à North Malaita :
"Si vous n'avez jamais été inclus dans un mécanisme de prise de décision, ou si vous n'avez jamais vu d'autres personnes y prendre part, comment pouvez-vous savoir que vous en avez ne serait-ce que la possibilité ?".
Bien que dans les Îles Salomon, les jeunes comme Julian ou Bartholomew soient confrontés à beaucoup d’autres difficultés, le fait pour eux de disposer d'un cadre qui leur permet de s’engager dans des processus de mobilisation et de participation peut atténuer le sentiment qu’ils ont d’être incompris et mal représentés.
Au niveau des provinces, les conseils de la jeunesse et les caucus de jeunes ont initié un changement important en devenant des lieux où la jeunesse peut faire entendre sa voix. D’ailleurs, non seulement les jeunes ont joué un rôle important en permettant à leurs communautés de rester informées et en bonne santé pendant l'épidémie de COVID-19 grâce à des activités de sensibilisation, mais ils ont aussi pris activement part à des initiatives de réconciliation. Les jeunes de North Malaita, par exemple, ont travaillé avec les associations de propriétaires terriens locaux pour aider à résoudre le conflit foncier qui opposait les deux communautés.
Brian Williams, du Bureau d'appui à la consolidation de la paix du Département des Nations Unies pour les affaires politiques et la consolidation de la paix, a déclaré : "La jeunesse des Îles Salomon crée son propre espace d’expression politique à travers les caucus de jeunes, les conseils provinciaux de la jeunesse et, surtout, le Congrès national de la jeunesse. Elle dispose de mécanismes bien définis lui permettant de promouvoir la traduction pratique de ses idées en termes politiques au niveau national à travers ces caucus, ces conseils et ce Congrès".
En créant vingt caucus de jeunes et en redonnant vie à quatre conseils provinciaux de la jeunesse, le PNUD contribue à créer un cadre qui favorise la cohésion sociale et la consolidation de la paix en permettant aux jeunes de jouer un rôle déterminant dans la construction de la nation des Îles Salomon.
Le renforcement de la participation des jeunes au processus de consolidation de la paix par la création de caucus de jeunes et la réactivation des conseils provinciaux de la jeunesse s’inscrit dans le cadre du projet "Empowering Youth as Agents for Peace and Social Cohesion in the Solomon Islands" ("Donner aux jeunes les moyens d'agir pour favoriser la paix et la cohésion sociale dans les Îles Salomon", en français), un projet mis en œuvre par le PNUD et l'OIT avec le soutien financier du Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix.
Cet article a été publié à l’origine en anglais par l'ONU dans le Pacifique. Appui éditorial fourni par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des activités de développement (BCAD). Traduction française réalisée par le BCAD. Pour en savoir plus sur l’action menée par l'ONU dans les îles Salomon, consultez le site pacific.un.org.