L’informatique : un levier précieux pour aider plus de filles et de femmes à prendre leur envol
Les technologies de l'information et de la communication (TIC) sont comme un train qui roule à toute vitesse. De nouvelles technologies sont sans cesse développées. Quiconque monte dans ce train va plus loin, plus vite, du moins en termes d'éducation, de revenus et d’opportunités.
Hélas, l'Union internationale des télécommunications (UIT) fait état d'un écart de 17 % entre les hommes et les femmes, au niveau mondial, en ce qui concerne l'utilisation de l'internet. Cet écart est encore plus important dans les pays les moins avancés. Le déséquilibre est également marqué au niveau des emplois et des opportunités dans le secteur des TIC.
Dans les années qui viennent, la pénurie de main-d'œuvre dans le secteur des TIC va s’accroître. De nouvelles opportunités vont émerger. Les filles et les jeunes femmes qui apprennent le codage, le développement d'applications et l'informatique seront bien placées pour faire carrière dans le secteur des TIC et dans d'autres domaines tels que la télémédecine, les services en ligne, les drones et les robots, les services d'argent mobile, la banque en ligne, etc. Moi, par exemple, j'utilise une application mobile pour envoyer de l’argent à une grand-mère de mon village, au Rwanda.
Mon expérience personnelle de l’informatique, y compris des outils les plus élémentaires, est instructive. En 1999, je vivais au Rwanda. Le monde craignait qu’au passage à l'an 2000, tous les ordinateurs se détraquent et tout s'arrête. Le Rwanda sortait d'une guerre et il était clair que, tôt ou tard, si on n’avait pas un diplôme de master, on risquait de ne pas trouver sa place sur le marché du travail. Je me suis inscrite à un programme de master alors que mon premier enfant avait deux ans et demi et que j'étais enceinte de mon deuxième. Je n'avais jamais vu d'ordinateur ! Les gens disaient que ces machines venaient d'Amérique et qu’elles fonctionnaient mieux que les machines à écrire.
Quand je suis arrivée en Amérique, pendant ma première semaine de cours, j’ai eu un devoir à faire. Je l’ai préparé soigneusement sous la forme d’une copie manuscrite. J’ai remis ma copie au professeur, qui m'a regardée l’air interloqué ! Il se demandait si je venais de Mars ! Je me suis demandé s'il voulait que j'écrive avec les pieds. "Comment les étudiants rendent-ils leurs devoirs ?", lui ai-je demandé. Il m'a expliqué que je devais me servir d’un ordinateur. J'ai senti mes cheveux se détacher de ma tête ! "C’est quoi, un ordinateur ?", ai-je demandé, perplexe. J’ai été orientée vers le laboratoire d'informatique, où on m’a tout expliqué. J'ai finalement tapé mon devoir à un doigt. Une dame m'a donné un vieux Macintosh qui avait l'air d'avoir un gros ventre. Alors, j’ai acheté un grand ordinateur portable pour mon année d’études.
Lorsque je suis rentrée chez moi, j'étais l'une des rares personnes à posséder un ordinateur portable, un téléphone portable - un énorme Nokia - et une adresse électronique. J'envoyais de temps en temps des courriels à mes amis aux États-Unis. Je suis devenue Conseillère auprès du Président, puis j'ai obtenu un poste de direction chez MTN, la première société de téléphonie mobile du Rwanda. J’ai par la suite été nommée Ambassadrice en Belgique, accréditée auprès de la Hollande, du Luxembourg et du Vatican. Je faisais partie des rares femmes en ville à savoir utiliser un ordinateur. Je suis rentrée chez moi avec un deuxième bébé, un diplôme de master et des connaissances technologiques ! Quand je vois des jeunes filles refuser d'aller étudier parce qu'elles n'ont pas de moyen de transport ou qu'elles ne sont pas allées au salon de coiffure le week-end, ça me dépasse !
Mon expérience personnelle montre que l'éducation des filles et leur participation aux TIC contribuent à combler le fossé entre les sexes. L'Organisation pour les femmes scientifiques dans le monde en développement mène une action précieuse dans ce domaine ; et la section mauricienne fait du bon travail.
Le système des Nations Unies a développé des programmes très utiles, comme l’initiative Les jeunes africaines savent coder portée par l'UIT et ONU-Femmes, le Forum international sur la gouvernance coorganisé par le Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies et l’organisation Halley Movement à Maurice, ou encore les Laboratoires d’accélération du PNUD à Maurice et aux Seychelles, pour ne citer que quelques exemples.
Grâce à ces programmes et à d'autres, l’ONU aide davantage de filles et de femmes à monter dans le train de la technologie et à bénéficier du même accès que les hommes aux opportunités offertes par les TIC. Mon message aux filles et aux femmes est le suivant : Il faut que vous saisissiez toutes les opportunités !
Christine N Umutoni est la Coordonnatrice résidente des Nations Unies à l'île Maurice et aux Seychelles.