Plusieurs vagues d'Haïtiens risquent leur vie dans des voyages en haute mer à la recherche d’un avenir meilleur

Le nombre d'Haïtiens tentant de migrer par des routes non officielles vers les pays voisins par bateau a considérablement augmenté en 2021.
Ces migrants partent à la recherche de ce qu'ils pensent être une vie meilleure. Ils sont incités à quitter leur pays en raison des difficultés économiques auxquelles ils font face, de l'insécurité et du tremblement de terre qui a récemment frappé le pays.
"J'essayais d'atteindre les Îles Turques et Caïques, mais le bateau à bord duquel j’étais a chaviré en mer. S'il j’avais accès à des opportunités pour démarrer ma propre entreprise, je resterais en Haïti".
L'histoire de Jacques*, un père de 32 ans originaire de la commune de Limonade, sur la côte nord d'Haïti, est typique. Comme lui, un nombre croissant de personnes tentent de quitter ce pays des Caraïbes de manière non officielle et sans les papiers requis.
Beaucoup voyagent sur des bateaux surchargés et en mauvais état dans l'espoir d'atteindre un des pays voisins comme les Îles Turques et Caïques, ou les Bahamas. De là, certains tentent de rejoindre les États-Unis.
Des migrations en nette hausse
L'ampleur réelle du nombre de personnes quittant Haïti est difficile à calculer avec précision. Cependant, l'Organisation internationale pour la migration (OIM) affirme que les garde-côtes haïtiens ont intercepté et rapatrié au moins 224 migrants en mer en 2020 et 605 en 2021.

"Un nombre croissant de migrants haïtiens font un périlleux voyage par la mer dans l'espoir d’accoster dans un autre pays", s’est exprimée Claire Gaulin, Chargée de projet à l'OIM pour l’aide aux migrants, à l'occasion de la Journée internationale des migrants, célébrée chaque année le 18 décembre.
"Ils sont motivés par un certain nombre de difficultés qu'ils rencontrent dans leur pays, notamment celles liées à l'insécurité et au manque d’emplois et de possibilités dans d’autres domaines. Dans certains cas, des personnes sont parties parce qu’elles avaient perdu leurs biens ou leurs moyens de subsistance à cause du tremblement de terre qui a frappé le sud-ouest du pays en août. Ces personnes ont toute une chose en commun", a-t-elle ajouté. "Elles sont à la recherche d’un avenir meilleur pour elles-mêmes et pour leur famille".
Un nombre de décès important durant les traversées
L’objectif de l’OIM n’est pas d’empêcher les migrants de quitter Haïti par bateau ou par d’autres moyens, mais plutôt de promouvoir une voie migratoire sûre, ordonnée et légale pour ceux qui veulent partir.
Beaucoup des migrants qui tentent la traversée par bateau ne survivent pas au voyage. L’OIM précise qu'il est "fréquent que les passagers perdent la vie à bord de ces bateaux".
Les migrants qui voyagent par bateau plutôt que par avion sont souvent des personnes vulnérables originaires des zones rurales. Souvent, ils doivent vendre leurs biens ou emprunter de l’argent à des usuriers avec des taux d'intérêt élevés pour pouvoir payer la traversée, dont le prix se situe en moyenne entre 350 et 700 dollars selon le type de bateau et la destination, mais peut atteindre 5.000 à 7.000 dollars.
Faciliter un retour digne des migrants
Avec l’appui de ses partenaires, l’OIM offre aux migrants, une fois qu’ils sont de retour en Haïti, une série de services pour les aider à rentrer chez eux dans des conditions dignes. Les migrants reçoivent de la nourriture et de l’eau à leur arrivée. Une aide médicale, psychologique et juridique est également mise à leur disposition en fonction des besoins. Ils reçoivent en outre une petite somme d’argent pour leur permettre de couvrir les frais de leur trajet de retour, qu’ils peuvent ainsi faire en toute sécurité. Ils ont, enfin, la possibilité d’obtenir des informations en appelant un numéro de téléphone dédié de l’OIM (numéro 840), en cas de besoin.
Beaucoup de migrants n’ont pas pleinement conscience des risques qu’ils prennent en tentant une traversée maritime. C’est pour cette raison que l’OIM a mis en œuvre des activités pour sensibiliser ceux qui sont tentés de migrer.

À Balan, qui est l’un des points clés de départ des bateaux, l’OIM a réalisé des peintures murales où l’on peut lire les citations de migrants mettant en garde contre les dangers des parcours migratoires illégaux.
De nombreux migrants disent qu'ils n'ont pas l'intention de quitter Haïti pour toujours et qu'ils y retourneront une fois qu'ils auront pu économiser de l'argent ou l'envoyer à leurs familles pour les aider à améliorer leurs conditions de vie.
"Pour éviter que les migrants ne risquent leur vie, il est fondamental de leur offrir des opportunités d'emploi en Haïti et de veiller à ce que leurs conditions de vie et d’accès aux services de base soient améliorées", explique Claire Gaulin.
Les organismes des Nations Unies en Haïti, dont l'UNICEF, le PAM, le PNUD et l'OIT, travaillent aux côtés de l'OIM pour fournir toute une gamme de services, notamment dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, de la protection sociale et de la création d'emplois décents. Ces services encourageront les Haïtiens à rester dans leur pays.
De retour à Limonade, Jacques se remet difficilement du voyage qu’il a tenté de faire en janvier. Il est incapable de dormir la nuit à cause d'une blessure qu'il s’est faite au moment où son bateau a fait naufrage. Il préfère dépenser l'argent qu'il a reçu de l'OIM pour envoyer son fils à l'école plutôt que pour soigner sa blessure, même s’il déplore ses problèmes de santé. " [Sans cette blessure], je serais capable de chercher des opportunités pour mon avenir et de reconstruire ma vie", confie-t-il.
*Nom d’emprunt.
La version originale de cet article a été publiée sur le site de l'ONU en Haïti. Pour en savoir plus sur l'action menée par l'ONU en Haïti, consultez le site https://haiti.un.org/fr.
Pour connaître les résultats de nos activités dans ce domaine et dans d'autres, consultez le dernier rapport en date de la Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement durable sur le BCAD.














