Crise de la COVID-19 et éducation : la Jordanie transforme les défis en opportunités
Chaque soir à 18h, des sirènes retentissent dans toute la Jordanie pour annoncer le début d’un couvre-feu qui durera jusqu'au lendemain matin 10h. Le royaume est en confinement depuis le 21 mars 2020 à cause de la crise de la COVID-19.
Au 3 mai, 459 cas cumulés de contaminations à la COVID-19 ont été enregistrés en Jordanie. Certes, ce nombre peut sembler insignifiant comparé aux plus de 3 millions de cas confirmés dans le monde, mais la Jordanie ne veut prendre aucun risque et elle semble jusqu'à présent avoir maîtrisé la propagation du virus. Les jardins d'enfants, les écoles, les universités et l’ensemble des établissements d'enseignement du pays sont fermés depuis le 15 mars 2020, affectant 2.372.736 apprenants.
La filière de l'enseignement technique et de la formation professionnelle (Technical Vocational and Education Training, en anglais, ou TVET) a cherché à assurer la continuité de l'enseignement pendant la crise, tous les établissements de l’enseignement supérieur n’étant pas en capacité de proposer aux étudiants des alternatives sous la forme de cours en ligne. Pour cette filière d'enseignement technique, la formation pratique est cruciale. Il a donc été difficile pour les étudiants de trouver des cours en ligne. La filière de l'enseignement technique et de la formation professionnelle a offert des opportunités d’apprentissage aux personnes les plus vulnérables, notamment aux adolescentes, aux réfugiés et aux jeunes Jordaniens vulnérables. L'impact immédiat de la COVID-19 doit être suivi de près et ce suivi doit concerner plus particulièrement les étudiants qui ont abandonné leur cursus et permettre de trouver des solutions innovantes pour remédier à ce problème.
Récemment, Aseel Sheikh Ahmad, 22 ans, a terminé son cursus de gestion hôtelière grâce à la bourse qui lui a été offerte dans le cadre du projet de l'UNESCO intitulé "Programme d'enseignement technique et de formation professionnelle pour les jeunes réfugiés jordaniens et syriens vulnérables". Ce projet a été mise en œuvre grâce au financement gracieusement mis à disposition par le gouvernement de la République de Corée dans le cadre d’un partenariat solide. Après avoir terminé la partie du programme consacrée à la formation pratique sur le terrain, Aseel a été engagée par Luminus comme barista.
"En attendant que cette période difficile soit derrière nous, je passe du temps chez moi à visionner des tutoriels qui proposent de nouvelles recettes et expliquent comment créer de nouvelles boissons. Je suis en contact permanent avec mes camarades de cours. Nous prenons des nouvelles les uns des autres pour être sûrs que nous nous en sortons tous bien", confie Aseel.
Chaza Aladawi a elle aussi reçu une bourse. Elle avait terminé ses études dans le cadre du programme d'enseignement technique et de formation professionnelle avant le début de la crise de la COVID-19. Elle a commencé à travailler comme cheffe dans un restaurant local. Originaire de Syrie, Chaza est arrivée en Jordanie avec sa famille en 2002 et s'est installée à Amman.
"Au début, j'avais du mal à rester chez moi et je craignais que le restaurant ne me licencie ou ne réduise mon salaire. Faire la cuisine pour les autres est quelque chose qui me manque beaucoup. Le sentiment d’évasion que cela me procure me manque aussi beaucoup", déplore Chaza. "Après un certain temps, j'ai pris conscience du fait que si nous restions à la maison, nous réduirions le risque d’avoir plus de gens malades. Pendant mon temps libre, je m’efforce d'en apprendre plus sur la cuisine arabe". Chaza est reconnaissante d'avoir eu la chance d'acquérir un savoir-faire pratique et ravie de pouvoir retrouver son emploi le moment venu.
L'UNESCO, en collaboration avec le HCR, a assuré une coordination étroite au sein du Groupe de travail du secteur de l'éducation en Jordanie. Cela a permis de disposer chaque semaine d’informations actualisées sur l'enseignement supérieur et sur la filière de l'enseignement technique et de la formation professionnelle, de cartographier les programmes existants et d’identifier les possibles actions à mettre en place pour répondre à l'impact de la COVID-19 sur les deux filières d’enseignement. Les bonnes pratiques qui ont émergé à l’occasion de cette crise devraient permettre de repenser et de faire évoluer l'éducation à moyen et long termes et de transformer ainsi les défis en opportunités.
À l'échelle mondiale, 91 % des apprenants sont aujourd'hui concernés par les fermetures temporaires des établissements éducatifs. Cette proportion représente plus d’1,5 milliard d'enfants et de jeunes. En cette période difficile, le système éducatif, les étudiants, les enseignants, les parents et les personnes qui s'occupent des enfants ont fait preuve d’une capacité remarquable à s'adapter à une situation de crise nationale et mondiale sans précédent. En réponse immédiate aux fermetures d'écoles et afin d'assurer la continuité de l’enseignement et de l'apprentissage, le ministère de l'éducation a mis en place des solutions d'apprentissage en ligne par le biais de cours télévisés et d'une plateforme d'apprentissage en ligne. Au cours des dix premiers jours de la crise, cette plateforme électronique a été consultée par environ 500.000 élèves, tandis que 800.000 élèves ont suivi le programme éducatif télévisé. Afin de permettre aux enseignants de relever ce nouveau défi, le ministère de l'éducation a également lancé une platforme pour les aider à s’adapter au nouveau contexte.
En Jordanie, l'UNESCO travaillera par ailleurs avec d’autres entités de l’ONU ainsi que les partenaires du secteur de l’éducation sur l’élaboration d’interventions dans le domaine de la planification adaptée aux situations de crise, en tenant compte à la fois des dimensions d’intervention et de préparation. L’appui apporté au gouvernement dans ce cadre portera plus particulièrement sur l’alignement du plan de réponse du ministère de l’éducation sur son plan stratégique national pour l'éducation. Parallèlement à cet appui et au travail réalisé pour faire le lien entre action humanitaire et action pour le développement, l'UNESCO plaide pour une continuité de l'apprentissage pour tous les groupes d'âge, en mettant l'accent sur l'équité et l'égalité ainsi que sur les programmes de soutien aux enfants et aux jeunes les plus vulnérables.
L'UNESCO travaille depuis longtemps dans le monde entier sur des interventions en temps de crise et a ainsi acquis un savoir et des compétences solides, notamment dans les domaines relevant de son mandat et de l’avantage comparatif qu’elle apporte en tant que chef de file du programme Éducation 2030. La pandémie de COVID-19 impacte tous les niveaux et toutes les formes d'éducation à travers le monde et l'UNESCO, en tant que gardienne de l'objectif de développement durable 4, a pour mission d’aider les institutions nationales à apporter des solutions aux différentes problématiques éducatives, en s'appuyant notamment sur des partenariats solides aux niveaux mondial, régional et national.
Produit par l’ONU en Jordanie. Cet article a été publié à l’origine en anglais sur le site web de l’ONU en Jordanie le 5 mai 2020. Pour en savoir plus sur l’action menée par l'équipe en place pour appuyer la réponse du gouvernement à la pandémie, consultez le site web de l’ONU en Jordanie.